Sénégal: « Mbekk mi al Golpes » à Thiaroye/mer - Drames et déboires de l'émigration clandestine




L'Union des professionnels de la communication des îles Canaries (Upc) et l'Association des clandestins rapatriés et familles affectées par l'émigration clandestine de Thiaroye-sur-mer se préoccupent de l'émigration clandestine. Ils ont, du 28 au 29 janvier 2009, organisé un symposium et une exposition sur la question. L'objectif est de sensibiliser les populations sur les dangers des voyages clandestins par la mer et de trouver des solutions.

C'est un jeune homme étendu de tout son long sur la plage de Tejita. La scène se passe sur l'île de Ténérife dans l'archipel espagnol des Canaries. La nuque enfouie dans le sable, la face tournée vers le ciel. Les yeux sont fermés. Il ne peut certainement pas voir au-delà de ces cils.
Entre le nez épaté et le menton carré, se dressent deux lèvres gonflées. La moitié supérieure du corps est nue. Les côtes sont pleines de blessures récentes. Quelques-unes sont recouvertes de pansements. Un secouriste de la croix rouge des îles Canaries et une jeune fille en bikini l'assistent. La photo de ce subsaharien trentenaire est prise par le photographe Esteban Pérez.
Il est peut-être un des 5 rescapés " partis le 6 février (2003) d'une plage située à proximité de la ville de Laayoune. Ils faisaient partie d'une expédition de 34 personnes réparties sur deux embarcations (...) À destination de Fuerteventura ", comme le raconte le correspondant du quotidien national espagnol El Pais aux Canaries. Après quelques heures en haute mer, soutient Juan Manuel Pardellas, le moteur cale et les passeurs sautent sur une autre embarcation abandonnant des hommes, des femmes et des enfants à eux-mêmes.
En haute mer, ni eaux ni nourriture, ils sont obligés de boire leurs propres urines et l'eau de mer et ronger le bois de leur barque. Ils meurent un à un jusqu'au quatorzième jour où les six restant seront secourus mais l'un d'eux perdra finalement la vie. Cette scène est une partie de l'émigration clandestine " vécue par près 40 000 africains jusqu'en 2004 ", renseigne le journaliste. Au Sénégal, on l'appelle " Mbekk-Mi ", en Espagne Al Golpes.
C'est la somme de ces deux termes " Mbekk-Mi Al Golpes " qui constitue justement le thème du symposium organisé par les membres de l'Association des clandestins rapatriés et familles affectées par l'émigration clandestine de Thiaroye sur Mer.
La manifestation se déroule du 28 au 29 janvier au foyer des jeunes de cette commune d'arrondissement de la banlieue dakaroise sérieusement affectée par l'émigration clandestine. En marge de ce symposium, une exposition de photos est organisée afin de sensibiliser sur les risques liés à cette activité illégale.
Parmi les photos de l'exposition, il y a celle prise par Esteban Pérez et d'autres de sa douzaine de collègues de l'Union des professionnels de la communication des Canaries (Upc). Il y a aussi des photos prises par l'association de Thiaroye sur Mer.
Mais, il y a surtout le livre de Juan Manuel Pardellas intitulé Héros d'Afrique (La Quinta Columna). Dans ce livre aussi traduit en wolof, Padellas a rassemblé quelques-uns de ses meilleurs reportages sur l'émigration clandestine, publiés dans El Pais pendant quatre ans. Tout comme les photos, ces reportages étalent au grand jour la tragédie que constitue l'émigration clandestine.
Les membres de l'Upc ainsi que Padellas ont effectué le déplacement de Thiaroye pour prendre part au symposium. Selon Elsa Casas, le ministre de l'Action extérieure du gouvernement des îles Canaries, " c'est une histoire dramatique, il faut trouver des solutions efficaces avec les populations ".

Elle l'a dit devant l'ambassadeur d'Espagne au Sénégal, Jorge Toledo, qui a réaffirmé la disposition de son pays à accompagner le Sénégal. Le ministre de l'Aménagement du territoire et de la Coopération décentralisée, Abdourahim Agne, a rappelé l'initiative gouvernementale " Took Tekki " pour répondre à la devise " Barsa wala Barsak "des candidats de la clandestinité.
Le jour meurt petit à petit à Thiaroye. Sur le podium du foyer des jeunes, une centaine de jeunes orphelins de l'immigration clandestine font le spectacle. À côté des autorités et devant les membres de leurs familles, ils chantent une chanson wolof pour inviter les garçons et les hommes à rester au pays, s'occuper des familles et apporter leurs contributions à la construction du pays.
Par Aly Diouf 30 Janvier 2009, Le Soleil

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